Comme chaque organe corporel, le cœur de nos compagnons peut être « malade ».
Il est important de faire la différence entre une atteinte « lésionnelle » du cœur, on parlera de cardiopathie, d’une atteinte fonctionnelle de ce dernier ou « insuffisance cardiaque ».
En effet, comprendre cette différence permet de percevoir l’intérêt du dépistage précoce d‘une cardiopathie afin d’optimiser la prise en charge de cette maladie et retarder l’évolution vers une réelle « défaillance » cardiaque.
Une cardiopathie signifie une maladie lésionnelle du cœur (atteinte musculaire et/ou des faisceaux électrique responsable de la fréquence des contractions et/ou des valvules entre les cavités et/ou des gros vaisseaux) qui n’engendre pas immédiatement de déficit « fonctionnel ».
Le coeur arrive alors à fournir un débit de sang suffisant à la demande de l’organisme, grâce à des mécanismes adaptatifs.
Nous parlons de stade « compensé » de la maladie cardiaque et l’animal ne présente aucun signe clinique, excepté des modifications possibles de l’auscultation cardiaque chez son vétérinaire (apparition d’un « souffle » ou bruit de turbulence du sang dans le cœur, de battements d’intensité modifiée ou de troubles du rythme).
Lorsque le cœur n’arrive plus à fournir un débit sanguin suffisent, on passe à un stade « décompensé » ou « d’ insuffisance cardiaque » qui entraîne l’apparition de signes cliniques : fatigabilité, intolérance à l’effort, toux, syncope, amaigrissement, …
Lorsque un propriétaire consulte en raison de ces symptômes, entre autres, nous sommes à un stade tardif de la maladie.
L’intérêt de la médecine préventive est de dépister les individus atteints AVANT le stade décompensé, grâce à des outils diagnostiques plus performants.
Les lésions cardiaques peuvent être présentes dès la naissance (congénitales) et se manifester dans les premiers mois à premières années de l’animal.
Elles peuvent être héréditaires donc transmissibles et se développer plus progressivement au cours de la vie de ce dernier en fonction de l’expression plus ou moins précoce des gènes.
Elles peuvent être enfin consécutives à l’évolution d’une autre maladie (hypertension artérielle, insuffisance rénale, maladie hormonale, infection, tumeur…) et être acquises consécutivement et de manière concomitante à celle ci.
La maladie valvulaire dégénérative mitrale est l’affection cardiaque la plus fréquemment rencontrée chez le Chien (≈ 80 %).
Elle touche en priorité les chiens de petites races (moins de 15 Kg) et consiste en la perte d’étanchéité progressive de la valvule mitrale qui perd de son élasticité et s’épaissit. Il apparaît alors un reflux sanguin ayant des conséquences sur le débit cardiaque et entraine l’apparition d’un « souffle » à l’auscultation.
Elle peut être héréditaire chez le Cavalier King Charles et le Teckel.
Les chiens de grandes races présente davantage une autre affection : la cardiomyopathie dilatée.
Le muscle cardiaque perd de sa capacité contractile, entrainant une chute du débit cardiaque et une dilatation majeure des cavités cardiaques. Elle représente 15 à 20 % des cardiopathies canines.
Elle est héréditaire chez le Doberman, le Cocker, le Dalmatien, le Dogue Allemand, l’Irish Wolfhound, le Terre-neuve, le Saint-Bernard, le Chien d’eau Portugais, le Boxer.
Le Boxer peut également présenter une affection particulière nommée « la Myopathie Arythmogène du Ventricule Droit ».
Enfin, les cardiopathies congénitales représentent moins de 5 % des cardiopathies, et sont surtout représentées soit par des anomalies des valves (dysplasie mitrale ou tricuspide, sténose aortique ou pulmonaire), soit des shunts entre cœur gauche et droit (persistance du canal artériel, communications inter-ventriculaire…).
Chez le Chat, c’est l’atteinte du muscle cardiaque (myocarde) qui domine (95% des cas) avec la cardiomyopathie hypertrophique (CMH) en tête dans 70 % des cas.
Elle se caractérise par un épaississement excessif du muscle cardiaque et un défaut de remplissage sanguin du ventricule.
Cette CMH peut être primaire (certaines races sont prédisposées comme le Persan, le British Shorthair, le Norvégien, le Scottish Fold, le Sphinx, parfois héréditaire comme chez le Maine Coon et le Ragdoll.
Elle peut également être secondaire à l’évolution d’une maladie rénale chronique, d’une hyperthyroïdie, d’une hypertension artérielle ….
D’autres atteintes du muscle cardiaque sont également décrites comme la cardiomyopathie dilatée (comparable à celle du Chien) ou la cardiomyopathie restrictive.
Des lésions valvulaires, notamment de la valvule mitrale sont également possibles.
Enfin, comme chez le Chien, les cardiopathies congénitales comptent pour moins de 5 % des cas, et les plus fréquentes sont la dysplasie tricuspidienne et la communication inter-ventriculaire.
Si l’examen clinique et l’auscultation cardio-respiratoire demeurent essentiels dans la détection de ces pathologies, certains cas sont plus frustes, notamment dans l’espèce féline.
En effet plus de 30 % des chats présentant une atteinte cardiaque n’ont aucun signe clinique détectable à l’examen ni aucune répercussion sur leur mode de vie rapportée par leur propriétaire.
La cardiopathie pourra alors se révéler dans l’urgence à la faveur d’un évènement déclencheur (stress, anesthésie générale, perfusion …).
Ces conditions étant toujours défavorables car la maladie est alors dans sa phase « décompensée » et la prise en charge « tardive ».
De même certains Chiens, notamment de grandes races, auront des signes parfois difficiles à détecter par leur propriétaire (tachycardie, troubles du rythme …) surtout si leur mode de vie est sédentaire.
Nous disposons désormais de nouveaux moyens de dépistage par prise de sang et dosage de marqueurs de « souffrance myocardique » telles que la Troponine I ou le NT-proBNP.
Les concentrations de ces biomarqueurs augmentent dans le sang en cas de cardiopathie et/ou de décompensation cardiaque et l’importance de leur élévation peut être corrélée à la gravité de la maladie et au pronostic de l’animal ; ils peuvent également constituer un outil de suivi thérapeutique. Leur interprétation étant bien évidemment à corréler à l’examen clinique.
Ainsi nous pourrons ensuite explorer la maladie et éviter des diagnostics tardifs.
Le seul examen capable d’évaluer l’anatomie et le fonctionnement cardiaque est l’échocardiographie.
Cet examen indolore et réalisable sans anesthésie, permet d’évaluer la forme et taille du coeur, mesurer ses parois et cavités, évaluer ses valvules et enregistrer vitesse et direction des flux sanguins au sein des différentes chambres cardiaques.
Les Radiographies thoraciques complètent l’exploration en permettant d’évaluer l’importance d’une augmentation de taille cardiaque mais surtout de dépister les complications pulmonaires d’une cardiopathie (vasodilatation, déplacement de la trachée, œdème pulmonaire …) et d’adapter au mieux le traitement.
L’électrocardiographie ou enregistrement de l’activité électrique cardiaque sera indiquée en cas de trouble du rythme avéré.
Enfin la mesure de la pression artérielle complète ce diagnostic, soit parce que son élévation peut être la cause de la cardiopathie, soit parce que sa valeur conditionne la prise en charge thérapeutique de l’animal.
Chez le Chien, cela se traduit tout d’abord par une fatigabilité avec une intolérance aux efforts importants au départ puis de plus en plus modérés. Ces signes peuvent passer inaperçus surtout si le chien est très sédentaire.
On peut également constater l’apparition d’une toux et/ou d’une accélération de la fréquence respiratoire au repos. Ce dernier signe étant assez évocateur d’un œdème des poumons.
Il peut également survenir des « pertes brutales et courtes de connaissance » ou syncopes, surtout lors d’un exercice, ou suite à un stress ou une excitation.
On peut également parfois noter un amaigrissement et une fonte musculaire concomitante à une augmentation anormale du volume abdominal en cas de la présence d’ascite (liquide d’épanchement abdominal) et de décompensation du cœur droit.
Chez le Chat, nous pouvons être confrontés à deux URGENCES :
– l’apparition d’une détresse respiratoire aigue des suite de l’apparition d’un épanchement thoracique et/ou d’œdème des poumons
– L’apparition d’une parésie ou paralysie aigue des membres des suites d’un accident thrombo embolique dans les artères iliaques (le plus fréquent) mais parfois également d’autres vaisseaux.
Face à la gravité de ces incidents cliniques, nous comprenons la nécessité d’un diagnostic et traitement précoces de ces cardiopathies. Nous avons actuellement suffisamment d’outils pour répondre à cette demande.